« hope you'll make a lot of friends out of there ».

Nombre de messages : 11 Age : 33 Date d'inscription : 21/08/2008

« entrechats, en-dedans, en-dehors, en-dedans, fouetté et arabesque ». Mon corps répêtait les mouvements que j'énumérais inlassablement. Rapide, vif. Je m'élançais en avant, reculais, tendais ma jambe pour mieux sauter. Aucune musique, juste le bruit de mes pieds battant le sol en rythme. Je tournoyais devant l'immense glace dans laquelle je n'osais me regarder. Je suais à grosses gouttes, ces dernières descendant le long de ma poitrine, passant sous mon body noir qui recouvrait mon frêle corps. Deux heures s'étaient écoulées depuis que j'avais passé les lourdes portes de la salle de danse et je ne m'étais accordé aucune seconde de répis. La danse me permettait d'extérioriser sans avoir à prononcer un mot. Mon corps parlait pour moi et c'était bien mieux ainsi. Je n'étais pas à ma place dans ce camp, à peine arrivée que je souhaitais déjà repartir. Mais pour aller où ? Je n'étais à ma place nulle part. Ici ou ailleurs ç'aurait été la même chose. « entrechats, en-dedans, en-dehors, en-dedans, fouetté et arabesque ». Encore une fois, toujours plus vite, plus gracieux. Je m'élançais telle une furie, tournoyant dans tous les sens. Je n'étais désormais plus maitre de mon corps. Mon coeur tambourinant dans ma poitrine à une vitesse affolante donnait le rythme, toujours plus vite. Mes cheveux s'échappaient peu à peu de mon chignon strict serré derrière mon crâne, brouillant ma vue, caressant de façon horripilante le haut de mes épaules. J'agitais ma tête, tentant vainement de les dégager puis mon pied droit se tordit violemment sous la pression de poids lorsque je touchais le sol après une énième pirouette. Dans un bruit effroyable, je m'effondrais sur le sol, la tête en avant. J'avais mal, horriblement mal mais je n'émis aucun gémissement, aucun cri de stupeur. Je restais un moment allongée sur le parquet de la salle de de danse, le miroir face à moi reflêtant la loque que j'étais. Mes cheveux s'étaient tous échappés de mon élastique et s'étiraient autour de mon visage, me cachant à quiconque passerait par là. J'avais envie de pleurer mais je me mordis fortement la lèvre inférieure pour m'en empêcher. Ce n'était pas la douleur qui me tirait quelques larmes mais plutôt la honte. Je ne supportais pas de faire des faux pas. La danse était la seule chose dans laquelle j'étais douée, dans laquelle je me sentais bien et il m'était insupportable de me tromper; je n'en avais pas le droit. Malgré tout, je me redressais péniblement et tirais ma cheville vers moi. La douleur était à son apogée maintenant et lorsque je tournais ma cheville dans tous les sens je retins un hurlement. Je n'avais pas pû me casser quelque chose, surtout pas la cheville. C'était mon outil de travail, je refusais qu'elle soit cassée. Une foulure se guérirait rapidement, j'espérais sincèrement que ce ne soit que ça. Mais j'avais trop mal et laissais retomber doucement ma cheville sur le sol, m'allongeant de tout mon long, fixant le plafond d'un blanc immaculé. On ouvrit bruyamment la porte et je ne bougeais pas d'un pouce.